La République de Biélorussie (en biélorusse : Рэспубліка Беларусь; en russe Республика Беларусь), est  un pays enclavé en Europe de l’est avec Minsk comme capitale; il a pour voisins, la Russie au nord-est, l’Ukraine au sud, la Pologne à l’ouest, la Lituanie et la Lettonie au nord-ouest. Jusqu’au 20e siècle, les régions qui constituent la Biélorussie actuelle appartenaient à différents pays; ultérieurement elles formèrent une des républiques constitutives de l’Union soviétique baptisée République socialiste soviétique de Biélorussie. Au moment de la dissolution de l’Union soviétique, la Biélorussie proclama son indépendance le 25 aout 1991.

La première attestation de marionnettistes itinérants parcourant la Biélorussie remonte au XVe siècle. Il existe des traces des spectacles de Zacharie et Ossip Yakoubovski à Vitebsk au XVIIe siècle. Plus tard, aux XVIIIe et XIXe siècles, diverses compagnies européennes parcoururent les routes du pays et montrèrent différents types de marionnettes et des spectacles mécaniques ou optiques.

Aux origines : la batleïka

La batleïka (mot dérivé du polonais Betleem, Bethléem) est une forme caractéristique du théâtre populaire biélorusse. Sa mention la plus ancienne date de la fin du XVIe siècle. La batleïka (parfois aussi nommée zhlob ou yaselka) émane des mystères européens que les Jésuites ont exportés jusqu’en Biélorussie via la Pologne. C’était un spectacle de la Nativité, semblable à la szopka polonaise ou au vertep ukrainien. Il s’agissait d’une en forme d’église ou de maison à deux étages. De petites marionnettes à tige, parfois recouvertes de peau de lapin pour assourdir les bruits de friction avec le bois, se mouvaient au travers de fentes percées dans la partie inférieure de la scène. À l’intérieur, la boite était couverte d’images de saints. L’espace de représentation était composé d’une partie centrale où se déroulait l’action et de deux arches réservées à l’entrée et à la sortie des figurines. La représentation était divisée en deux parties. La première partie combinait le mystère de la Nativité et la mort du roi Hérode. Au départ, quand la batleïka était une pratique exclusivement rituelle, seule cette partie était montrée. Mais à partir du XVIIe siècle, la partie religieuse commença à perdre de l’importance au profit d’une seconde partie séculière et profane qui montrait des sketchs joyeux et souvent obscènes avec des dialogues comiques, des bagarres et des calembours. Le personnage principal des sketchs était un paysan biélorusse, gaffeur, espiègle et astucieux, répondant au nom de Matey. Il était accompagné de nombreux autres personnages de nationalités et d’occupations diverses (le docteur, le dandy, le gitan, le juif, le cosaque, etc.). Le nombre et l’ordre des scènes relevaient de l’habileté particulière du montreur de batleïka qui, à lui seul, devait animer et faire parler jusqu’à quarante marionnettes. La batleïka était donnée en musique (bien souvent avec un violon et un tambourin).

Quand l’Église vit cette pratique sacrée devenir un moment de pur divertissement, elle s’y opposa. Ironiquement, cela contribua à la diffusion et à la popularité de la batleïka. Elle fut montrée en tous lieux – dans les maisons, les tavernes, les rues et sur les places des villes et des villages – et fut transmise d’une dynastie à l’autre. À la fin du XIXe siècle, alors que les traditions populaires du théâtre perdaient en dynamisme, on tenta de mettre par écrit les pièces et les représentations des marionnettistes. La batleïka se trouve mentionnée jusque dans les années vingt. Elle joua un rôle décisif dans le développement du théâtre et de la mise en scène biélorusse. Ses thèmes, ses  intrigues et ses intentions ont alimenté toutes sortes de relectures des metteurs en scène. À partir des années quatre-vingt les compagnies s’inspirèrent également du castelet de batleïka et de sa structure à deux étages, ainsi que de la fusion unique du profane et du sacré sur une même scène.

L’époque soviétique

L’art de la marionnette biélorusse dans les années trente s’inspira des modèles russes et ukrainiens. L’enthousiasme du public et le soutien de l’État permirent de créer des formations spécialisées d’où sortirent de nombreuses compagnies amateures ou professionnelles. Le premier théâtre national, le Belorusskyi gosudarstvennyi teatr kukol (en biélorusse : Белорусский государственный театр кукол; Théâtre national biélorusse de marionnettes), fut établi à Gomel en 1938. Pendant la deuxième guerre mondiale, la troupe se produisit pour l’armée. Elle s’installa de manière permanente à Minsk en 1950. Les épisodes les plus glorieux de son histoire sont indissociables des noms du directeur Anatoli Leliavski (1923-1995) et du décorateur Leonid Bykov (né en 1927), qui codirigèrent la compagnie jusqu’à la fin des années cinquante. On leur doit une vogue pour les héros, les intrigues romanesques, et les issues artistiques imprévisibles. Ils contribuèrent à enrichir les scènes biélorusses d’une grande variété de marionnettes et à étendre le registre des techniques scéniques.

À partir des années soixante, le vaste territoire de la République soviétique de Biélorussie se couvrit de théâtres de marionnettes. Ils étaient généralement créés par des acteurs en complément des compagnies théâtrales, et ils devenaient, par la suite, des entités indépendantes. Ce schéma de développement dura jusqu’à la fin du XXe siècle.

Aujourd’hui

Dès avant le début du XXIe siècle, chaque ville biélorusse jouissait de son propre théâtre d’État de marionnettes, chose extraordinaire pour un pays d’une telle superficie : Gomel (fondé en 1963), Brest (1968), Maguilev (1976), Grodna (1981), Vitebsk (1985), Maladzetchna (1990, Théâtre régional de Marionnettes de Minsk).

En 1996, un centre national UNIMA fut créé et installé dans les locaux du Théâtre de marionnettes de Brest, dirigé par Mikhaïl Chavel qui devint également président du centre.

D’un point de vue esthétique, la marionnette biélorusse est le fruit des traditions théâtrales nationales et de la riche tradition de certains de ses voisins : Pologne, Lituanie, Russie, Ukraine.

Les productions locales se distinguent par un mélange équilibré d’expérimentations et d’accessibilité. Elles varient en genre (de la batleïka traditionnelle à la revue de musique pop), en taille et en techniques. Depuis les années quatre-vingt-dix, le théâtre de marionnettes biélorusse ayant obtenu des droits équivalents à ceux du théâtre d’acteurs, les marionnettes prospèrent librement et sans complexes aux côtés des pièces de théâtre, des comédies musicales, de la musique populaire et des arts visuels. En Biélorussie, la marionnette est une forme artistique à la fois respectée et extrêmement populaire. Les différentes compagnies sont, malgré la distance, en dialogue constant les unes avec les autres et collaborent volontiers avec des partenaires du monde entier. Les principaux metteurs en scène (Mikalaï Andréiev, Alexeï Leliavski, Aleg Jiougjda, et d’autres) travaillent avec différentes compagnies, en Biélorussie ou à l’étranger. L’importance qu’ils accordent aux classiques mondiaux (Le Miracle de saint Antoine et L’Oiseau bleu de Maurice Maeterlinck ; L’Enfant de l’Étoile d’Oscar Wilde ; Les Chaises d’Eugène Ionesco ; La Tempête et Macbeth de William Shakespeare ; Le Suicidé de Nicolaï Erdman ; Le Roi et Strip-tease de Słavomir Mrożek ne les empêche pas de se replonger parfois dans le répertoire national et de l’alimenter par leur collaboration avec des auteurs biélorusses contemporains.

Les marionnettistes biélorusses sont estimés dans le monde entier et le pays accueille régulièrement des festivals internationaux : à Minsk, depuis 1990, et à Brest, depuis 1996. La Belaya Vezha (Белая Вежа ; Tour blanche), festival annuel fondé en partie par le théâtre de marionnettes de Brest, se distingue par la richesse de sa programmation.

Depuis 1975, l’Académie biélorusse des arts de Minsk (Belorusskaja gosudarstvennaja akademija iskusstv; Белорусская государственная академия искусств), forme professionnellement les montreurs, les metteurs en scène et les décorateurs. En 2005, les cours étaient dirigés par Alexeï Leliavski.

Bibliographie

  • Baryshev, Guriy. Batleïka. Minsk, 2000 (en russe).
  • Bykov, Leonid. Teatralnye kukly i shirmy [Marionnettes et écrans de théâtre]. Minsk, 1968 (en russe).
    Bykov, Leonid, et Syargey Yurkevitch. Volshebnyi mir teatra kukol [Le Monde magique du théâtre de marionnettes]. Minsk, 1997 (en russe).
  • Kaladzinsky, Mikhail. Teatr lyalek Savetskai Belarusi [Le Théâtre de marionnette en Biélorussie soviétique]. Minsk, 1976 (en biélorusse).