Compagnie de marionnettes thaïlandaise dont le nom propre est Sakorn Natasin Troupe. Sakorn Yangkiosod (ou Yangkhiawsod, né à Bangkok, 1923-2007) prit, dans les années quarante, le nom de Joe Louis par admiration pour le boxeur américain portant ce patronyme et fonda à Bangkok son théâtre de marionnettes qu’on appelle couramment Joe Louis Theatre. Il fut élevé au rang d’Artiste national en 1996 et, après sa mort, ses enfants, dont son fils Pisutr Yangkiosod, reprirent la compagnie.
Le théâtre, situé dans le marché nocturne Suan Lum de Bangkok (après sa fermeture, le groupe déménagea et rouvrit un nouveau théâtre, en 2012) donne quotidiennement des spectacles de marionnettes classiques thaïlandaises. L’histoire de la troupe reflète la lutte d’un genre classique (le hun lakon lek), issu d’origines diverses, dans un pays qui mise sur la mondialisation pour sa survie.
Le hun lakon lek dérive du hun krabok (marionnette à tiges), une tradition d’influence chinoise dans laquelle, à la place d’avoir un marionnettiste par figure, trois personnes sont nécessaires pour faire danser une seule figure. La compagnie fabrique ses propres figures en papier mâché selon une iconographie inspirée par les marionnettes de cour à tiges (hun luang) et le théâtre de masques (khon). Hautes de près d’un mètre, les marionnettes évoluent au son d’un enregistrement d’orchestre piphat. Le marionnettiste principal bouge la tête et la main droite ; le deuxième, la main gauche ; le troisième, les jambes. Tous trois produisent un effet d’ombres multiples amplifiant l’expressivité de la figure. Ils déplacent leurs pieds selon les pas de la danse classique thaïlandaise. Un seul manipulateur suffit pour les personnages secondaires. Les hommes manipulent les personnages masculins, les ogres et les singes ; les femmes, les personnages féminins. Le plus souvent, les pièces sont extraites du Ramakien, version thaïlandaise du Râmâyana, et les décors peints s’inspirent des fresques des temples.
Le genre hun lakon lek a été créé sous le règne du roi Râma VI (1910-1925) par Krae Suppawanich, un aristocrate de la province d’Ayutthaya. Il installa une troupe à Bangkok pour diffuser les traditions palatiales dans le peuple. Les parents de Joe Louis en firent partie et transmirent leur art à leur fils. Un arrêté de 1942 bannit tout art non indigène, ce qui frappa d’interdit la marionnette à tiges, considérée comme chinoise. L’interdiction ne fut levée qu’à la fin de la guerre du Vietnam et, à son tour, Joe Louis put transmettre son art à ses enfants à partir de 1975.
Le public, où se mêlent Thaïlandais et touristes, est moins nombreux au début du XXIe siècle, ce qui fait peser des incertitudes sur l’avenir de la troupe.
(Voir Thaïlande.)
Bibliographie
- Chandavij, Natthapatra, and Pomporn Pramualratana. Thai Puppets and Khon Masks. Bangkok: River Books, 1998.
- Virulrak, Surapone, and Kathy Foley. “Hun: Thai Doll Puppetry”. Asian Theatre Journal. Vol. XVIII, No. 1. Spring 2001. Special Issue on Puppetry. Honolulu: University of Hawai’i Press, 2001, pp. 81-86. Issue Stable URL: http://www.jstor.org/stable/i247078