La République du Nicaragua, (en espagnol República de Nicaragua), est un pays multiethnique situé dans l’isthme d’Amérique centrale jouxtant le Honduras, au nord et le Costa Rica au sud. Comme toute la région, le pays a été intégré à l’empire espagnol, au début du 16e siècle. Il proclama son indépendance en 1821 et devint une république autonome en 1838.

Comme dans d’autres pays d’Amérique latine, les arts scéniques ont été marqués au Nicaragua par la double empreinte d’un théâtre populaire – mêlant cultures préhispaniques et traditions espagnoles d’origines médiévales – et d’un « art cultivé » fortement marqué par l’imitation de la dramaturgie ibérique du XIXe siècle. Si l’on écarte le güegüense, spectacle très particulier de mime et de danse (« comédie maîtresse » comme l’appela José Martí), a offert des oeuvres anonymes fortement métissées et encouragées par les missionnaires, dès la conquête, tandis que le second a permis l’expression des premiers auteurs nationaux. La rencontre entre cultures indienne et espagnole a engendré de nouvelles formes d’expression artistique dans la musique, dans le théâtre, dans le cirque, voire dans la langue.

La scène théâtrale aux XIXe et XXe siècles

Au XIXe siècle, la distraction favorite des enfants nicaraguayens était d’écouter les cuentos del camino (les contes du chemin) que les adultes leur racontaient dans les champs et de suivre ainsi les aventures de l’Oncle Coyote ou de l’Oncle Lapin, des personnages devenus célèbres en Amérique centrale que l’on retrouva dans le théâtre de marionnettes. Sur le plan littéraire, il faut souligner le rôle que joua le célèbre poète nicaraguayen Rubén Darío (1867- 1916), à l’origine du mouvement moderniste en Amérique latine et de la poésie moderne en castillan. Si le « Poema del otoño y otros poemas » (Poème de l’automne, 1910) dédié à Margarita Debayle est un modèle de conte versifié et théâtralisé, on peut également trouver dans son oeuvre pour enfants d’autres textes écrits pour le théâtre et pour les marionnettes. Alors qu’il était consul général de Colombie à Buenos Aires, Rubén Darío fit la connaissance du clown britannique Frank Brown (1858-1948) avec qui il se lia d’amitié et qu’il évoque dans son autobiographie ; ce clown, acrobate et marionnettiste connut le succès en Argentine et plus particulièrement auprès des enfants.

On peut également trouver dans le Movimiento Literario de Vanguardia (Mouvement littéraire d’Avant-garde), surgi à Granada au début des années trente, les ferments d’une rénovation des arts scéniques au Nicaragua. En effet, dans son premier manifeste paru en 1931, ses signataires annonçaient qu’ils ouvriraient « sur n’importe quelle place, scène ou baraque, un petit théâtre dans lequel ils présenteraient des oeuvres de théâtre moderne, étranger, des autos mystères, des ballets, des colloques, pastourelles et toutes sortes de scènes pour acteurs et pour marionnettes, du théâtre colonial et du théâtre populaire ».

C’est ainsi qu’Antonio Cuadra créa le Teatrito Lope (Petit Théâtre Lope) dans la cour de la Casa de los Exalumnos del Colegio Centroamérica (Maison des anciens Élèves du Collège d’Amérique centrale) en 1935. Les artistes d’avant-garde qui avaient été formés dans cette institution par les jésuites présentèrent ainsi des adaptations du théâtre classique, des intermèdes médiévaux, tandis qu’ils découvraient des œuvres typiquement nicaraguayennes comme le güegüense. Plus littéraire que folklorique, El Güegüense ou El Macho Ratón (Le vaillant Souriceau) est une représentation théâtrale satirique dont les origines remontent à l’époque précolombienne et qui montre, à travers des danses, des déguisements, des masques et des chants de quelle façon les Nicaraguayens pouvaient se moquer de l’Espagnol et tromper le fier conquistador. Cette tradition très vivante fut reprise dans la culture populaire par un spectacle comme La gigantona y el enano cabezón (La grosse Géante et le Nain à grosse Tête) au cours des célèbres processions de têtes géantes (cabezudos) très enracinées dans le théâtre populaire nicaraguayen (voir Marionnettes Géantes) et dans les fêtes auxquelles assiste chaque année, encore aujourd’hui, la population, en particulier dans la région de León.

Dans les années quarante, l’art de la marionnette tendit à se fondre dans le théâtre de rue et dans le cirque avant de se rénover quelque peu dans les années soixante-dix avec la présence de Mucris et son personnage de Negrito Chocolate. Au cours de la décennie suivante, le théâtre de marionnettes nicaraguayen s’enrichit des contributions et des créations du Teatro Estudio de la Universidad Centroamericana (TEUCA) dirigé par Mario González Gramajo qui s’illustra en 1976-1978, après une adaptation remarquée de Cendrillon de Charles Perrault en 1967, par la mise en scène de plusieurs œoeuvres pour enfants de l’écrivain nicaraguayen Octavio Robledo, telles que La gallina ciega (La Poule aveugle) et Un jardín para ser felíz (Un Jardin pour être heureux) ou encore de Dormite niñito (Endors-toi Petit) de Salvador Cardenal Argüello. Il faut aussi mentionner le travail du Centro Escolar Leonor García de Estrada (Centre scolaire Leonor García de Estrada) qui présenta en 1977, au Teatro Nacional Rubén Darío (Théâtre national Rubén Darío), La pájara pinta, oeuvre écrite et mise en scène par Floricelda Rivas Aráuz.

Les marionnettes après la Révolution

Après la révolution sandiniste de 1979, un ministère de la Culture fut créé et un département exclusivement dédié au théâtre de marionnettes y fut constitué. La compagnie Teatro de Títeres Guachipilin, fondée en 1981 par Fernando Gonzalo Cuellar, est représentative de l’époque. Puis naquirent l’ensemble Marionetas Traca-Traca dirigé par Mario Martínez, la Compañía Teatro de Títeres Juguemos dirigée par José David Sánchez, compagnie Teatro de Títeres Zig Zag (Théâtre de Marionnettes Zigzag) de Roberto Barberena, le Teatro de Títeres Masayá (Teatro Escolar) (Théâtre scolaire des Marionnettes Masayá), le Grupo de Títeres Sonrisas (Compagnie de Marionnettes Sourire) animée par Diana Brooks, puis la Compañía Nacional Infantil de Teatro y Títeres (Compagnie nationale de Théâtre et de Marionnettes pour Enfants).

Bibliographie

  • Arellano, Jorge Eduardo. “Los altibajos de una tradición”. Un siglo de teatro en escenarios de dos mundos. Inventario teatral de Iberoamérica. Madrid: Centro de documentación teatral, 1988.
  • Calderón, José Manuel, ed. Rubén Darío para niños. Illustrations by Rafael Contento. Madrid: Ediciones de la Torre, 1988.
  • Darío, Rubén. Margarita. Illustrations by Monika Doppert. Santiago du Chile: Editorial Pehuén, 1990.