Située à l’est de l’Afrique, la Tanzanie jouxte le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi, la République démocratique du Congo, la Zambie, le Malawi, le Mozambique, et l’océan Indien, à l’est. L’Allemagne et la Grande-Bretagne ont colonisé la Tanzanie et l’archipel de Zanzibar à la fin du XIXe siècle. Après l’indépendance (respectivement en 1961 et 1963) les deux régions fusionnèrent en 1964 pour constituer la République unie de Tanzanie (en Swahili : Jamhuri ya Muungano wa Tanzania). Le pays compte plus de 120 groupes ethniques avec une majorité de Bantou. La population tanzanienne inclut aussi de petites minorités d’origines arabe, indienne, pakistanaise, européenne et chinoise). Les langues officielles sont le swahili et l’anglais. La capitale de la Tanzanie est Dodoma et la plus grande ville Dar es-Salaam.  

La découverte de la marionnette tanzanienne est récente, datant de la dernière décennie du XXe siècle. Les premiers travaux consacrés à ce théâtre révèlent son caractère initiatique, magique, sexuel, musical et ludique.

Statuettes initiatiques

On dénombre, en Tanzanie, nombre de sociétés non côtières où existent des figurines en terre crue à fonction didactique. Ces statuettes évoquent des thèmes mythiques et moraux. Leur manipulation, qui a lieu dans la maison d’initiation, s’apparente à « une leçon de probité théâtralisée », dispensée aux novices par les grands initiés. Les figurines, dissimulées sous une étoffe, sont mises en mouvement et montrées à mesure du rituel. Leur exhibition s’accompagne de commentaires et de chants.

Poupées de fécondité

Il existe des poupées magiques de fécondité (mwana hiti, « enfant de bois ») dans toute la Tanzanie. Chez les Zaramo, elles sont remises aux jeunes filles à l’occasion des fêtes accompagnées de danses organisées un an après leurs premières menstrues. Chaque fillette reçoit deux poupées taillées dans du bois, une grande et une petite, qu’elle conserve près d’elle, sorte de prescription contre la stérilité. La grande poupée est censée inciter à de nombreux enfantements ; elle sera donc toujours gardée par la fillette comme un objet de chevet alors que la petite peut être abandonnée après le premier accouchement. Ces figurines sont à l’opposé d’un simple jouet d’enfant : traitées avec déférence, elles sont soumises à des codes particuliers que les jeunes propriétaires doivent scrupuleusement respecter.

Marionnettes de substitution

Les mêmes Zaramo observaient une pratique impliquant des statuettes de bois, articulées et vêtues que l’on utilisait à l’occasion des funérailles. En absence d’un fils ou d’un neveu du défunt, ces effigies remplaçaient le parent manquant au cours de la cérémonie à laquelle celui-ci était censé assister. Dressées dans le cimetière, elles étaient animées, prenant la parole par le truchement d’un ventriloque embauché pour imiter la voix de l’absent.

Autres marionnettes

Chez les Sukuma, la société de danse nommée bacheyeki détient une figure de tambourinaire qu’elle utilise dans des ballets. Cette marionnette de bois, est pourvue de deux bras mobiles pour battre le rythme sur son petit tambour et porte une couronne de plumes, symbolisant la vie, la force, la fécondité et le sacrifice.

Dans les villages de Masua et de Bariadi, célèbres pour leurs rassemblements de musiciens, ont été découvertes, en 1992, une vingtaine de marionnettes (amaleba) ayant appartenu aux associations de musiciens. Ces figurines étaient louées par des villageois pour les rites agraires à accomplir pendant la saison sèche, de juin à septembre. Elles étaient portées par des danseurs qui les fixaient sur leur tête et les actionnaient en dansant. Habituellement nues et généreusement sexuées, les amaleba se produisaient en solo ou en couple. Certaines avaient un aspect grotesque, tel ce mari unijambiste traité avec beaucoup d’humour.

On remarque également des marionnettes « érotiques », qu’on promène sur des lits de bois portés par quatre montreurs-danseurs, dont les histoires polissonnes font éclater de rire.

Il existe par ailleurs des marionnettes-jouets, créations des jeunes villageois. Ils les confectionnent avec une feuille de bananier et des baguettes pour fixer les bras et les jambes. À l’aide de ces fragiles créatures, les garçons improvisent un combat à l’issue duquel leurs pantins tombent en morceaux.

Makaragosi (le nom est dérivé des spectacles de marionnettes Karagöz) qui étaient également populaires à Zanzibar (ile qui constitue une région semi-autonome de Tanzanie) et étaient présentés dans le parc Mnazi Moja essentiellement durant le ramadan, mois de jeûne. La tradition disparut dans les années 1960.  

En 2012, Creative Solutions Mangapwani, une ONG, commencèrent à revivifier l’art de la marionnette à Zanzibar. Aida Ayers de « Creative Solutions » avec l’auteur zanzibaro-norvégien Issak Esmail Issak et de jeunes acteurs zanzibariens créèrent des oeuvres telles que Ruya and Rabia, une histoire de deux soeurs qui se déroule à Makudunchi, dans les années 1930.  

Des groupes de développement ont animé certains ateliers concernant l’usage de la marionnette dans le domaine de la santé et relatèrent les résultats dans un rapport à l’université de Dar es-Salaam. En 2012, Dharmira Artist Company, dirigée par Robert Mwampembwa, avec le soutien du Tanzania Media Fund, créa le Pikabom Puppet Show pour la télévision qui utilise les marionnettes pour des caricatures humoristiques et pour une critique politico-sociale. Le groupe incorpore des idées de la Civil Society Organisations (CSO) ; le projet de show émane du XYZ Show du Kenya qui fut développé par Gado (Godfrey Mwampembwa), caricaturiste et réalisateur de films tanzanien.

Bibliographie

  • Darkowska-Nidzgorski, Olenka. Théâtre populaire de Marionnettes en Afrique sub-saharienne. Series II  “Mémoires et Monographies”. Vol. 60. Bandundu: Ceeba Publications, 1980.
  • Darkowska-Nidzgorski, Olenka, et Denis Nidzgorski. Marionnettes et Masques au Cœur du Théâtre africain. Saint-Maur: Institut international de la Marionnette/Éditions Sépia, 1998.
  • Cameron, Elizabeth. Isn’t S/He a Doll? Play and Ritual in African Sculpture. Los Angeles: UCLA Fowler Museum of Cultural History, 1996.
  • Gründ, Françoise. “Rencontre avec Françoise Gründ (2e partie)”. Marionnettes. No. 2, 1984, pp. 21-22.
  • Meurant, Georges. “Tanzanie méconnue”. Part 4. Arts d’Afrique noire. Arts premiers, 1992.
  • “Pikabom Puppet Show”. http://www.comminit.com/edutain-africa/content/pikabom-puppet-show. Accessed 3 juillet 2013.
  • “Pikabom Puppet Show”. http://www.youtube.com/watch?v=3GQW5jvElco. Accessed 3 juillet 2013.