La République du Tchad (en arabe : تشاد Tšād, جمهورية تشا Ǧumhūriyyat Tšād) étend du désert du Sahara à l’Afrique tropicale et comprend deux-cents groupes ethniques ; la majorité de la population est musulmane, mais on compte aussi d’importants groupes chrétiens et animistes. Agriculture et élevage sont les principales activités (culture du coton, notamment). Depuis 2003, la production de pétrole est devenue une activité économique importante).
Bien que la marionnette soit documentée dans la recherche et les rapports de l’époque coloniale française (1913-1960), depuis l’indépendance (1960) l’information sur les marionnettes est réduite.
Marionnettes traditionnelles et objets manipulés
On peut considérer comme premiers témoignages de l’existence de la marionnette tchadienne, les figurines d’argile préhistoriques trouvées au cours de fouilles archéologiques. Certaines de ces statuettes semblent porter des traces d’articulations.
Au monde de la marionnette, on peut rattacher l’animation d’objets magiques. Le général Gouraud (fin XIXe siècle) décrit une calebasse, porte- bonheur pour la prospérité du commerce. Préparée spécialement, cette courge possède son rituel particulier, la transformant en un objet animé et magique. On retrouve cette même utilisation pour certaines poupées de fertilité et certains fétiches.
Enfin, avec le récit de Marcel Sauvage, en 1934, nous observons le phénomène du « cadavre utilisé comme marionnette ». Les funérailles d’un chef de village se déroulent autour d’un bucher. Le mort est « mis en scène », sa tête empaquetée d’étrange façon, entouré de sagaies, de haches, de vieilles bouteilles et de marmites. A côté du bucher, trois longs tambours sont chevauchés par des hommes nus au visage masqué. Les participants se roulent dans la boue et dansent sur place.
Une des formes traditionnelles du théâtre animé du Tchad est la marionnette manipulée avec les pieds, que l’on trouve notamment chez les Musey (voir marionnettes aux pieds). Très répandues autrefois, ces petites marionnettes qui vont par couple, faites de bois ou de tiges de bois, sont enfilées sur une ficelle fixée à chaque orteil du montreur, assis, jambes écartées. En chantant un refrain, celui-ci se frappe les mollets avec le plat des mains et fait évoluer les figurines pour qu’elles avancent, se rencontrent, s’entrechoquent et termine généralement la scène par un simulacre de l’acte sexuel (voir Rites). Encore joué pour les fêtes d’un clan Musey en 1977, ce type de spectacle semble être actuellement en régression même s’il reste un jeu pour les enfants, qui l’exécutent comme une vraie petite représentation.
Un autre genre de théâtre est véhiculé par des compagnies itinérantes ou semi-itinérantes. En effet, le pays a toujours été sillonné par des saltimbanques (à l’allure extravagante et parfois efféminée), des acrobates, musiciens ambulants et montreurs de marionnettes. Il faut citer le théâtre de marionnettes Kanuri qui était encore très actif dans les années quarante. Sur une photo de cette époque, on voit une représentation donnée, dans la journée, en plein air et à proximité d’un village. Les spectateurs sont assis par terre. Le montreur est caché sous un castelet en forme de petite tente de tissu sombre, dressé au ras du sol à une certaine distance du public. L’espace resté libre est réservé à deux tambourinaires. Les marionnettes sortent d’une fente aménagée en haut du castelet. Pour ce type de spectacle, la poupée a besoin d’une voix à son échelle ; le montreur utilise souvent un petit instrument (proche du sifflet pratique) qu’il se place dans la bouche ou dans une narine. La scène est délimitée par une ligne tracée sur le sol. Le répertoire de ce théâtre est constitué de courtes scènes comiques, véritables satires sociales, puisées dans la vie quotidienne : mauvaise conduite sexuelle, corruption de tous ordres, déboires des chefs de village, moqueries du colon, etc.
Une autre forme théâtrale utilise un leurre de chasse en forme d’oiseau calao. Cette « marionnette » est faite d’un véritable bec d’oiseau placé sur une âme de bois recouverte de cuir, ornée de graines rouges et d’éclats de miroir pour figurer les yeux. Elle est fixée sur un bandeau frontal qu’un marionnettiste mime anime en se déplaçant à quatre pattes dans les herbes et les buissons. Ce type de représentation, suffisamment élaborée et spectaculaire, faisait parfois partie de grandes fêtes traditionnelles ou modernes.
Marionnettes contemporaines / modernes
Depuis 1991, de plus en plus souvent, on utilise la marionnette comme moyen d’éducation populaire. Le suisse Jean Bindschedler et le tchadien Noudjiri Isidore Balyom œuvrent dans ce sens avec un répertoire traitant de l’alcoolisme, du sida, des enfants illégitimes etc. Des démarches en vue de créer un centre national UNIMA ont été initiées, plus récemment, par Mariam Mayoumbila (née en1963), une actrice-dramaturge ayant travaillé à Radio-Tchad (1984-1996) avant de devenir directrice du Ballet national du Tchad (1996-2006) et présidente de la commission Éducation-Culture-Jeunesse et des Sports du Conseil culturel, économique et social. Son groupe, Kadja-Kossi, soutient les échanges culturels et utilise le théâtre pour éduquer et divertir.
Bibliographie
- Darkowska-Nidzgorski, Olenka, et Denis Nidzgorski. Marionnettes et Masques au Cœur du Théâtre africain. Saint-Maur : Institut international de la Marionnette/Éditions Sépia, 1998.
- Duisburg, Adolf von. Im Lande des Cheghu von Bornu. Berlin : Reimer, 1942.
- Gouraud, Général Henri Joseph Eugène. Zinder, Tchad. Souvenirs d’un Africain. Paris : Plon, 1944.
- Sauvage, Marcel. Les Secrets de l’Afrique noire. Paris : Denoël, 1947.