Marionnettes à manipulation équiplane. Cette manipulation est surtout pratiquée en Afrique, notamment en Côte-d’Ivoire : « Il (le vieux griot) attache une ficelle aux gros orteils de ses pieds ; cette ficelle est enfilée au travers du corps de deux marionnettes grossières, représentant un homme et une femme. Assis par terre, il écarte ses pieds, tendant ainsi la ficelle ; puis, en remuant ses orteils, il imprime à la ficelle une série de secousses qui font rapprocher ou s’éloigner l’une de l’autre les deux marionnettes, jusqu’au choc final » (Maurice Delafosse, Les Frontières de la Côte-d’Ivoire, 1908).

Ces marionnettes sont souvent utilisées à des fins divinatoires comme celles des Lobi du Burkina Faso. Elles sont en bois sculpté, prolongées à leur base par un anneau circulaire qui les fait basculer pendant la manipulation limitée par un dessin sur le sol. L’unique ficelle traverse leur tronc, une boucle à chaque extrémité est accrochée aux gros orteils du devin. L’homme est appelé Sié et la femme Yeli. C’est la position des marionnettes, combinée avec la position de cauris lancés au sol, qui induit les prédictions précédées d’invocations.

D’autres marionnettes de ce type ont été recensées par Olenka Darkowska-Nidzgorski : les tuma diyondo, des marionnettes en bois de bananier des Bakwa-Luntu de la République démocratique du Congo, à la tête-tronc sculptée, aux jambes articulées, manipulées par une ficelle passant par deux crochets métalliques ou, dans la ville de Gisenyi, les marionnettes des Hutu du Rwanda fabriquées en bois pyrogravé, équipées d’un fil en boucle. Ici, le couple est joint par les bras qui sont articulés sur un axe en fil de fer tandis que les jambes sont montées sur un axe et jouent librement. On peut aussi citer celles des Lega du Zaïre, à Goma ; les bwanamandjanga, marionnettes des Ngbaka de l’ex-Zaïre, monoxyles, sculptées, un contrepoids attaché à l’un de leurs pieds ; les mikosh, des marionnettes plates des Sonde, en moelle de bambou, avec leur tête-tronc, leurs bras articulés aux épaules, leurs jambes montées sur un axe et jouant librement, et leur phallus articulé ; enfin, les marionnettes abarambo constituées de deux bouts de bois, de quatre boulettes d’argile et de deux plumes.

Chantal Lombard évoque le jeu des « danseurs de twist » en Côte-d’Ivoire où les marionnettes en moelle de palmier-raphia ont de 15 à 20 centimètres de haut. Le torse et la tête, dont le visage est sculpté, sont constitués d’un seul élément ; deux bâtonnets, pliés en deux, sont fixés aux épaules et aux hanches ; les jambes sont attachées aux hanches par un axe et jouent librement. Ces marionnettes sont sexuées : un trou au ventre pour l’une et un long phallus horizontal pour l’autre. Les marionnettes, face à face, sont juste posées sur un fil en boucle que le manipulateur assis par terre, tend entre ses gros orteils. L’habileté du joueur consiste à les rapprocher. Il tend plus ou moins la ficelle en se tapant sur les cuisses. Les tressautements du couple amènent le sexe de l’un dans celui de l’autre à la grande joie des jeunes garçons. Ces marionnettes ludiques existaient depuis longtemps au Cameroun, à la République démocratique du Congo et à la République du Congo (Congo-Brazzaville ; voir Rites).

Bien que n’entrant pas dans cette catégorie de marionnettes aux pieds, le fait d’équiper des marionnettes de fils horizontaux pour les manipuler, est déjà illustré dans le manuscrit d’Herrade de Landsberg, Hortus deliciarum, datant de la fin du XIIe siècle, à cette différence près que la manipulation des deux marionnettes s’effectuait sur table. C’est le même principe qui permet d’agiter, au ras du sol, les marionnettes à la planchette.

Il faut mentionner aussi le théâtre de marionnettes ibibio du Nigeria. Il est constitué d’un castelet, dans lequel le jeu akan est manipulé « en tablette » avec une seule poupée. Cinq mètres au-dessus, le jeu ekpo akpara se déroule entre deux marionnettes traversées par un fil horizontal suspendu entre deux perches.

Bibliographie

  • Darkowska-Nidzgorski, Olenka. Marionnettes en territoire africain. Catalogue d’exposition. Charleville-Mézières: Éditions de l’Institut international de la marionnette, 1991.
  • Delafosse, Maurice. Les Frontières de la Côte d’Ivoire, de la Côte-d’Or et du Soudan. Paris: Masson & Cie, 1908.
  • Lombard, Chantal. “Les Marionnettes aux pieds du Pays Godie (Côte d’Ivoire)”. Unima-France. No. 63, 1979, pp. 20-21.
  • Unima-Informations. Théâtre populaire de marionnettes en Afrique noire. Paris, 1976, Nos. 61-61; L’Afrique noire en marionnettes, 1988.