L’Uruguay officiellement dénommé République orientale d’Uruguay (en espagnol : República Oriental del Uruguay) est situé au sud-est de l’Amérique du Sud. Il jouxte l’Argentine et le Brésil. Les Espagnols sont arrivés dans cette région au début du XVIIe siècle ; dès lors elle fut disputée entre les empires du Portugal et de l’Espagne. L’Uruguay obtint son indépendance en 1830. Montevideo est la capitale nationale. (Voir Amérique latine.)

C’est à l’occasion d’un simple fait divers rapporté lors d’un procès pour vol, en 1792 à Montevideo, qu’apparait le nom d’un certain Juan Camacho, victime d’un cambriolage alors qu’il amusait la population avec sa « boite à marionnettes ». Avant la construction de la Casa de Comedias (Comédie) de Montevideo à la fin du XVIIIe siècle, l’art de la marionnette n’était qu’un spectacle de circonstance, dont on ne peut retrouver les traces qu’à travers la petite histoire comme celle de ce marionnettiste sorti de l’anonymat par un journaliste de l’époque. Il existe peu de témoignages sur la vie culturelle et artistique du début du XIXe siècle. Le pays connaissait, alors, d’importants soubresauts politiques et militaires qui le conduisirent à l’indépendance en 1830. Il faut cependant rappeler que l’immigration massive en provenance de très nombreux pays du monde a apporté à l’Uruguay une très grande diversité culturelle.

Autour de 1840, surgit Misericordia Campana (Cloche Miséricorde) une marionnette à gaine créée par Ambrosio Camarinhas, célèbre sonneur de La Iglesia Matriz (L’église Matriz) et esclave fugitif originaire de Pernambuco, au Brésil. Il est intéressant de remarquer que ces deux personnages, la marionnette et son marionnettiste, étaient tous deux noirs dans l’un des ports négriers les plus importants d’Amérique latine. Par ailleurs, en guise de coups de matraque, son créateur avait adapté la capoeira, la danse-lutte brésilienne née dans les bagnes et pratiquée avec des balancements du corps et des coups de pieds et de tête. Misericordia Campana devint un véritable héros dans toutes les pièces où il apparaissait, réparant les offenses, protégeant les jeunes filles, sans autre arme que sa tête.

Autour de 1870 apparurent des compagnies étrangères de marionnettistes – avec des marionnettes à fils et à tringles en particulier – parmi lesquelles les célèbres pupi italiens ainsi que le montreur et acteur Salsilli. Vers 1887, les London’s Fantoches et, en 1898, la compagnie anglaise de Thomas Holden, célèbre en Europe, se produisirent dans la région du Río de la Plata. La scène théâtrale uruguayenne s’enrichit alors d’influences diverses et le public devint de plus en plus amateur de spectacles de cirque et de marionnettes.

Le XXe siècle

Entre 1900 et 1930, de nombreuses compagnies étrangères (dont la compagnie italienne Teatro dei Piccoli de Vittorio Podrecca, au théâtre Solis) firent plusieurs tournées dans le pays, tandis que naissait le théâtre uruguayen grâce notamment à des acteurs en provenance du cirque comme les frères Podesta. L’apport du marionnettiste argentin Javier Villafañe fut non seulement décisif pour les vocations artistiques, mais laissa aussi des traces profondes dans l’enseignement. Avec sa troupe La Andariega, Villafañe sillonna en effet le pays avec des expositions de marionnettes et, en collaboration avec les instituteurs, donna des cours d’initiation dans les écoles.

La présence de Federico García Lorca entre novembre 1933 et mars 1934 et la présentation, un jour avant le départ du poète espagnol, d’El retablillo de Don Cristóbal (Le petit Retable de Don Cristóbal) constituent un moment important dans l’évolution du milieu théâtral à Buenos Aires et à Montevideo. Ne serait-ce que par la participation au spectacle de l’actrice Helena Cortesina qui, avec Andrés Mejuto, se produisit par la suite avec le théâtre El Guirigay de Margarita Xirgu dans la capitale et à l’intérieur du pays. Comme le rappelle Villafañe lui-même dans un de ses écrits, en 1938, le poète Humberto Zarrilli, Fernando Amado et un groupe de professeurs donnèrent plusieurs spectacles de marionnettes à Montevideo.

En 1940, Felipe Novoa dirigea le théâtre de l’Université populaire de Montevideo et présenta, dans les quartiers de la ville, des œuvres du dessinateur Julio Emilio Suárez, créateur du personnage de Peloduro. De même, le peintre Carlos Prevosti, Elsa Caraffé de Marchand et Hortensia G. de Heijo organisèrent dans des écoles expérimentales des spectacles de marionnettes. Dans ces années, s’illustrèrent également un auteur comme Juan Manuel Tenuta ainsi que la compagnie de marionnettes à gaines des frères Pagani, dirigée par Juan Pagani, peintre, sculpteur, musicien et ébéniste qui, bien que basé en Argentine, fit de nombreux séjours en Uruguay, ressuscitant notamment le personnage de Misericordia Campana.

Dans les années quarante, la présence à Montevideo de l’actrice catalane Margarita Xirgu apporta à la scène théâtrale uruguayenne un changement décisif. Éloignée de son pays natal par la guerre civile puis par la dictature franquiste, elle partagea, en effet, ses années d’exil entre divers pays d’Amérique latine, le Mexique tout d’abord, puis le Chili et finalement l’Uruguay où elle mourut en 1969. Elle y accomplit un remarquable travail d’enseignement, formant plusieurs générations d’acteurs à la tête de l’Escuela Municipal de Arte Dramático (École municipale d’Art dramatique) créée à Montevideo en 1949. Plusieurs marionnettistes suivirent ses cours et participèrent à sa compagnie théâtrale parmi lesquels Andrés Mejuto, important acteur espagnol exilé entre Buenos Aires et Montevideo, et Helena Cortesina, qui, déjà marionnettistes en Espagne dans les années trente, présentèrent des œuvres pour marionnettes de Javier Villafañe ou de Mané Bernardo et donnèrent des cours à l’Université populaire de Montevideo.

La compagnie El Duende (le Lutin), fut fondée par Rosita Bafico en 1940. Comprenant son mari Armando González (créateur des marionnettes), Juan Manuel Tenuta ainsi que Bruno Musitelli, ce groupe fut invité au Chili en 1946-1947 par Pablo Neruda. Pour des raisons politiques, la troupe déménagea en 1947 en Bolivie où elle fut embauchée par le ministère de l’Éducation pour donner des représentations et pour enseigner. Juan Manuel Tenuta s’installa alors à Concepción, au Chili, où il dirigea la Compañía de Arte « Pinocho » (Compagnie d’art Pinocchio) en 1948.

À Tacuarembo, Pato Escayola (1901-1979) mena un travail pionnier en contribuant au développement du théâtre de marionnettes à l’intérieur du pays et laissa d’importantes archives en plus de ses propres marionnettes fabriquées avec de la pâte à papier et du bois de ceibo. Il faut aussi mentionner l’apport d’Irma Abirad, actrice et professeure, qui intégra l’équipe enseignante de l’École d’Art dramatique soutenue par le Servicio oficial de radiodifusión y espectáculos (SODRE) et qui, avec ses élèves, créa le Teatro de Títeres Maese Pedro (Théâtre de Marionnettes Maitre Pierre) avec un répertoire composé d’œuvres de Cervantès et de Javier Villafañe, entre autres. Durant sa longue carrière, elle se lia avec de nombreux marionnettistes célèbres parmi lesquels Villafañe, Marcel Temporal ou Sergueï Obraztsov. En 1963, abandonnant son activité de marionnettiste, elle prit la direction des programmes pédagogiques de la télévision destinés à l’enseignement secondaire et se consacra à la recherche ainsi qu’à sa remarquable collection de marionnettes.

Parmi les nombreux artistes qui apparurent sur la scène théâtrale dans les années cinquante, on peut citer Roberto Rius et sa compagnie de marionnettes à fils fondée en 1948, active dans plusieurs pays d’Amérique latine, Jaime Pares et Selva Suffo, et leur compagnie Vidalita depuis 1954, très appréciés en Uruguay et en Argentine et surtout le théâtre El Galpón (le Hangar), la plus importante expérience artistique du pays dans le domaine des marionnettes.

Depuis sa fondation en 1949, convaincu de la nécessité impérieuse de former de nouveaux publics et d’éduquer les futurs spectateurs, le Galpón s’est intensément consacré au théâtre pour enfants et plus particulièrement au théâtre de marionnettes sous la direction de Juan Manuel Tenuta et de Bruno Musitelli. En 1952, cette institution fonda son école de marionnettistes, dirigée à partir de 1955 par Rosita Baffico, à laquelle se joignit par la suite le montreur argentin Eduardo Di Mauro. Ultérieurement, des acteurs marionnettistes comme Nicolás Loureiro, Curi, Salcedo, Miguel Cherro, Aída Rodríguez, Blanca Loureiro et d’autres intégrèrent l’équipe. Par ailleurs, le Théâtre circulaire de Montevideo fut lancé en 1954 avec des œuvres pour enfants comme Pluft el fantasmita (Pluft le petit Fantôme) de la Brésilienne María Clara Machado ou El altillo encantado (Le Placard enchanté).

D’autres artistes apportèrent également leur pierre au théâtre de marionnettes dans ces années (Alice Soler Petit, Luis Mario Somuna … ) et, aujourd’hui, le pays compte entre une douzaine et une quinzaine de troupes et de groupes professionnels ou amateurs, qui se rencontrent de préférence à Montevideo, Piriápolis, San José, Punta del Este et Canelones. En 1978, fut créée l’UNIMA-Uruguay, actuellement dirigée par Adriana Cabrera de la compagnie La Gotera.

(Voir aussi Antonio W. Rodriguez, Café Teatro, Gustavo Sosa Zerpa, Montiel Ballesteros, Museo Vivo del Títere, Rolando Speranza, Teatro de Títeres Mateluna, Títeres de Cachiporra, Títeres Gira-Sol.)

Bibliographie

  • Rela, Walter. Breve historia del teatro uruguayo. Buenos Aires: Editorial Universitaria de Buenos Aires, 1966.
  • Rodríguez, Aida, and Nicolás Loureiro. Como son los títeres. Montevideo: Editorial Losada Uruguaya, 1971.
  • Rossi, Vicente. Teatro nacional rioplatense. Buenos Aires: Hachette, 1960.
  • Villafañe, Javier. Los niños y los títeres. Buenos Aires: El Ateneo, 1944.