Personnage légendaire, dont l’histoire a été diffusée par la Légende dorée de Jacques de Voragine (XIIIe siècle) et qui est devenu, à partir du XIIIe siècle, une héroïne traditionnelle du théâtre de marionnettes. Fille du duc de Brabant et épouse du comte Siffroy (en Allemagne : Siegfried), Geneviève (en Allemagne : Genovefa) est confiée à l’intendant Golo par son mari lorsque celui-ci part combattre les Sarrazins. Golo tente de séduire Geneviève, en vain. Au retour du comte, il l’accuse d’adultère et la fait condamner à mort. Toutefois, ses bourreaux apitoyés ne la tuent pas, mais l’abandonnent dans la forêt avec son enfant. Des années plus tard, Siffroy, au cours d’une chasse, poursuivant une biche merveilleuse (qui avait allaité l’enfant), retrouve Geneviève. Celle-ci prouve son innocence, mais meurt des souffrances qu’elle a endurées. Golo est châtié.

La légende, dont le motif est déjà dans le Râmâyana, se diffusa largement dès le Moyen Âge. Sa première version pour marionnettes, provenant du Brabant (région aujourd’hui partagée entre les Pays-Bas et la Belgique), date de 1716. La pièce devint l’un des sujets de prédilection des compagnies de marionnettes allemandes qui voyageaient à travers la Bohème au milieu du XVIIIe siècle et le sujet le plus diffusé du théâtre tchèque. Il inspira à Franz Joseph Haydn (1732-1809) et à Karl Michael Joseph von Pauersbach (1737-1809) l’un de leurs opéras pour marionnettes créés au château Esterháza et il entra au répertoire du Münchner Marionettentheater (Théâtre de marionnettes de Munich), destiné à l’éducation des enfants. Au XIXe siècle, de nombreuses troupes françaises en présentaient une adaptation partageant de nombreux traits avec la version allemande. Le texte publié par Gaston Baty rassemble des représentations de plusieurs compagnies itinérantes, dont celle des Pitou, dans lesquelles apparaissent souvent des personnages locaux. Geneviève de Brabant offrit aussi à Érik Satie le sujet d’une courte musique de scène écrite sans doute pour le théâtre d’ombres (1899), mais généralement jouée comme opéra pour marionnettes : les Walton’s (voir Pajot-Walton (famille)) l’interprétèrent lors de la création posthume (Paris,1926) ; Toone l’interpréta à Bruxelles, Otello Sarzi en Italie, ainsi que la compagnie Colla (Venise, 1983), et Massimo Schuster la mit en scène pour le Theater Taptoe (1998).

Thème cher au romantisme allemand (drames de Wilhelm Müller, Ludwig Tieck, Christian Friedrich Hebbel, opéra de Robert Schumann), Geneviève de Brabant reste ancrée dans la tradition populaire : en images d’Épinal elle inspira Erik Satie, en vues de lanterne magique elle illumina la chambre du jeune Marcel Proust (au début de À la recherche du temps perdu) et en marionnettes à tringle le petit Théâtre Al Botroûle, à Liège, Belgique, joue toujours le drame de l’innocence persécutée.

(Voir Belgique, France.)