L’histoire plus récente de la République d’Autriche (en allemand : Republik Österreich) situé en Europe centrale fait suite à la dynastie des Habsbourg alors que la plus grande partie du pays relevait du Saint Empire Romain Germanique. Durant les 17e et 18e siècles, l’Autriche fut une des grandes puissances européenne. En 1867, l’empire se transforma en empire austro-hongrois. L’empire des Habsbourg (Autriche-Hongrie) s’écroula en 1918. Aujourd’hui, l’Autriche est une démocratie représentative parlementaire et sa capitale est ville la plus grande est Vienne.

Si l’on peut repérer un ancêtre de Hanswurst dès le XVIIe siècle à Vienne, avec le personnage de Riepel, rival du paysan Wästl dans les spectacles pieux donnés par les jésuites avec des acteurs vivants, les marionnettistes de cette époque étaient, en fait, des étrangers qui installaient des théâtres itinérants sur les places de la ville, mettant en scène des marionnettes à fils ou marionnettes à gaine, ou alternant spectacles d’acteurs et de marionnettes.

Beaucoup étaient des montreurs de Pulcinella venus du sud de l’Europe : Blasius Manfredi, originaire de Malte, en 1649, le Bolognais Pietro Gimonde en 1657, Peter Resonier, « montreur italien de marionnettes », qui joua de 1667 à 1707 sur la Judenplatz à Vienne. Les « joueurs de Pulcinella » Stephan Landolphi et Joris (Georg) Hilverding se produisirent également à Vienne. Pulcinella devint ainsi rapidement populaire en Autriche. Il perdit son demi-masque noir, mais conserva son nez crochu, sa bosse et son gros ventre.

À Salzbourg, les foires annuelles du Dultzeit au printemps et le Ruperti-Dult en automne attiraient de nombreux conteurs et marionnettistes itinérants. Gaines, fils, tringles, toutes sortes de marionnettes étaient mises en scène. Dans les villages et les faubourgs, les spectacles avaient lieu dans les auberges, ils étaient destinés aux petites gens et aux paysans.

L’attrait de Vienne sur les marionnettistes et sur les gens de théâtre en général s’accrut à partir de 1776 quand Joseph II abrogea le monopole impérial sur le théâtre, établi depuis 1728. Entre 1776 et 1810, de nombreux théâtres fixes de marionnettes à fils furent créés dans les faubourgs de Vienne, où ils constituaient de modestes théâtres municipaux. Cependant, les autorisations à se produire demeuraient un privilège réservé à des marionnettistes locaux de bonne réputation et aux qualités de jeu attestées. Des familles d’artistes comme les Walcher, les Glass ou les Schindler s’installèrent dans les faubourgs de Vienne et y montrèrent, entre autres, jusque dans les années 1990 pour Hermann Walcher (1916-1991), des spectacles de marionnettes à fils et d’improvisation. Le lien entre théâtre de marionnettes à fils et spectacle d’improvisation semble avoir été une spécificité de la tradition populaire dramatique.

Les personnages populaires germanophones

Le personnage comique de Hanswurst (Jean Saucisse), même si ses origines remontent au XVIe siècle, doit beaucoup aux directeurs de troupe Johann Baptist Hilverding (1677-1721) et Joseph Anton Stranitzky (1676-1726). On dit que Hilverding fut son père spirituel et que Stranitzky lui donna la vie, l’incarnant pour la première fois en 1708 sur la place du Neuen Markt à Vienne. Après la mort de Stranitzy, c’est Gottfried Prehauser (1699-1769) qui reprit le rôle de Hanswurst. Mais sa liberté de jeu fut restreinte sous la pression des réformateurs « éclairés » du théâtre, qui, dès 1752, régirent strictement les spectacles reposant sur l’improvisation. Après la mort de Prehauser, le personnage fut interdit, mais il survécut en partie dans celui de Kasperl Larifari que créa à Vienne le comédien Johann Laroche (1745-1806) et qui fut ensuite repris en marionnette. Contrairement au Kasperl à fils, le Kasperl à gaine dominait le spectacle par ses répliques comiques et ses scènes de bagarres. Le chancelier Metternich (1773-1859) fit taire cette « grande gueule » de 1810 à 1848. Toutefois, même muet, le Kasperl à gaine ne perdit guère de son pouvoir subversif.

Le Wurstelprater (« le Prater de la Saucisse »), comme on surnomma une partie du parc impérial du Prater offert par Joseph II à la population viennoise en 1766, accueillit de nombreux spectacles de Hanswurst, acteur et marionnette, puis de Kasperl. Le marionnettiste à gaine Wilhelm Valcareggi (1869-1940) y donna ses spectacles de Kasperl jusqu’au début du XXe siècle. Les spectacles étaient fondés sur l’improvisation et l’enchainement des scènes était similaire à celui des Punch and Judy, shows anglais. Tout ce que représentait État, pédantisme, snobisme, bureaucratie, était brocardé sans vergogne.

L’influence tchèque

La Bohême, région unie à l’Autriche sous la tutelle des Habsbourg, connut une « renaissance nationale » durant la seconde moitié du XIXe siècle. Les marionnettistes viennois y trouvèrent matière à spectacle, commentant avec humour ces tentatives d’émancipation. Le marionnettiste Georg Niedermayer (1860-1942) popularisa le personnage de Pimperl (voir Pimprle), personnage originaire de Bohême. C’est vers la fin du XIXe siècle que le marionnettiste Johann Trappl (1843-1912) installa son théâtre sur l’un des nombreux petits Prater qui se développaient en marge du grand Prater. Sa spécialité : des spectacles de marionnettes à fils accompagnés d’un orgue de Barbarie. Dans ces spectacles jouait, aux côtés de Kasper, un certain Wenzel. Celui-ci parlait allemand avec un accent tchèque, tout en se disant viennois de souche, se tournait en ridicule, et c’est Kasper qui avait le dernier mot et rétablissait l’ordre.

Autres types de spectacles

De nouvelles formes de théâtre de figures vinrent concurrencer les plus traditionnelles. À la fin du XIXe siècle se développa l’opéra de marionnettes, souvent considéré comme l’héritage des Hilverding : Florian Bahonek (1865-1943) fut l’un de ceux qui, en 1887, montraient des spectacles de marionnettes inspirés d’opéras. Cette tradition est toujours vivante de nos jours à Vienne et à Salzbourg (voir Salzburger Marionettentheater).

Les arts mécaniques et optiques eurent du succès à partir du XVIIIe siècle. C’est en 1752 que fut achevé le Théâtre mécanique hydraulique des Jardins d’Hellbrunn, à Salzbourg. Matthias Tendler (1753-1825), originaire d’Eisenerz en Styrie, et le Tyrolien Christian Joseph Tschuggmall (1785-1855) voyageaient avec leurs cabinets à figures mécaniques. La crèche mécanique de Steyr, créée vers 1800, est aujourd’hui le plus ancien théâtre de marionnettes à tiges d’Europe toujours en activité. D’autres crèches furent créées à Vienne, à Traismauer, à Linz, à Sankt Pölten, à Eger. Mais cette tradition perdit de sa popularité au début du XIXe siècle et la plupart des crèches mécaniques disparurent progressivement (voir Nativité).

Le théâtre de papier, venu d’Angleterre au début du XIXe siècle, connut un succès important en Autriche. L’édition de théâtres de papier commença vers 1820 avec les ateliers lithographiques des frères Joseph (1792-1839) et Matthias (1790-1868) Trentsensky. Les plus demandés étaient les classiques du théâtre (Guillaume Tell et Les Brigands de Schiller, Faust de Goethe) et de l’opéra (Lohengrin de Wagner, Turandot de Puccini). La réalisation des planches fut confiée à de jeunes et brillants artistes tels Moritz von Schwind, Josef Kriehuber, Josef Danhauser ou Johann Matthias Ranftl. Textes et sources furent adaptés de façon à intéresser au théâtre, enfants et adolescents.

Le XXe siècle

On distingue deux nouveaux courants dans le théâtre de marionnettes autrichien au début du XXe siècle, l’un dit « artistique », l’autre dit « éducatif ». Le premier est dû aux artistes plasticiens qui reconnurent dans le théâtre de marionnettes un moyen d’expression artistique. Le second naquit de l’intérêt des enseignants et des pédagogues pour ce théâtre qui fut, par la suite, intégré aux programmes scolaires.

Les marionnettes artistiques

Les Marionnettes de Salzbourg – Salzburger Marionettentheater – figurent parmi les premiers théâtres artistiques de marionnettes autrichiens et sont toujours en activité au début du XXIe siècle. Leur particularité : jouer des opéras de Mozart mais aussi d’autres grands compositeurs. Pour leur première, en février 1913, leur directeur Anton Aicher mit en scène Les Amours de Bastien et Bastienne de Mozart. Un autre théâtre artistique exceptionnel fut le Figurenspiegel, imaginé et mis au point en 1932 par Richard Teschner (1879-1948), aujourd’hui au Musée autrichien du Théâtre (Vienne), l’Österreichisches Theatermuseum. S’inspirant des marionnettes à tiges javanaises du wayang golek, Richard Teschner créa un nouveau type de marionnettes à tiges qu’il mit en scène dans des spectacles de pantomime accompagnés de musique. Son Figurenspiegel (Miroir aux Marionnettes) s’émancipait du castelet : il était composé d’une scène circulaire unique en son genre. Dans les années 1930, les marionnettes de Salzbourg et le Figurenspiegel de Teschner connurent un succès international : en Russie en 1936 et à Paris en 1937, notamment, pour les marionnettes d’Anton Aicher, à Londres en 1934 pour le Figurenspiegel de Teschner. C’est aussi à cette époque, en 1936, que Heinrich Ruprecht fonda à Vienne son théâtre artistique de marionnettes à fils où il présenta des pièces du Comte Franz von Pocci, des légendes viennoises, des pièces personnelles et des solos.

Le théâtre de marionnettes éducatif

A partir des années 1920, les troupes familiales cédèrent progressivement la place aux petits théâtres dont les directeurs étaient issus de la petite ou de la moyenne bourgeoisie. Les personnages qui faisaient autrefois l’objet des railleries tel le Docteur ou le Professeur furent désormais traités avec respect.
Sur les foires, les joueurs d’instruments de musique mécaniques obtinrent de meilleurs emplacements que les marionnettistes. Ayant perdu le public des adultes, ces derniers se tournèrent alors vers celui des enfants. Par ailleurs, la pédagogie devint une partie importante du spectacle et le nouveau Kasper humaniste se répandit aussi dans les écoles. L’université populaire de Vienne Urania proposa des cours d’apprentissage des arts de la marionnette auxquels participèrent surtout des pédagogues. L’étudiant en psychologie Siegfried Raeck, qui animait un de ces cours, publia en 1934 son Kasperlbuch (Livre de Kasper) dans lequel il établit une bibliographie critique des pièces de Kasper. Les marionnettistes dont le répertoire comportait les pièces désignées comme « inappropriées » furent alors en difficulté.

Le théâtre de marionnettes sous influence nazie

L’Autriche fut annexée à l’Allemagne de 1938 à 1945. Durant cette période, l’activité des marionnettistes fut régie par l’administration nazie. Pour continuer à pratiquer leur art, les marionnettistes durent se déclarer auprès de leur organisation professionnelle attitrée, avec l’obligation de prouver leur « appartenance à la race aryenne ». Les contenus et les personnages traditionnels, Kasper en particulier, furent adaptés aux préceptes germanophiles et antisémites.

Vers le renouveau

Le couple d’enseignants Marianne et Hans Kraus fonda en 1950 l’Urania Puppentheater (Théâtre de Marionnettes Urania), qui représenta, avec ses deux personnages principaux Kasper et l’ourson Pezi, le nouveau théâtre de Kasper viennois d’après-guerre à destination des enfants.

Depuis les années 1970, les moyens d’expression utilisés dans les arts des marionnettes se sont diversifiés. L’acteur, porteur du texte et manipulateur, cherche sa place aux côtés de la marionnette, tel Arminio Rothstein (1927-1994), figure importante de la marionnette d’après-guerre (fils, gaines, tiges), qui fut l’un des premiers en Autriche à se mettre en scène aux côtés de ses marionnettes, notamment dans le personnage du clown Habakuk.

Arts du spectacle

De nouvelles alliances entre la comédie, le théâtre de masques, la pantomime, la danse, la musique et le théâtre d’objets produisent des spectacles originaux à destination des enfants et des adultes. Erwin Piplits (né en 1939) mena dans les années soixante-dix des expériences novatrices dans son PupoDrom et plus tard dans son Serapionstheater, théâtre en images et en mouvements.

Matériaux, formes, techniques de manipulation évoluent en fonction de l’imagination et de l’inspiration des artistes, dont beaucoup jouissent d’une renommée internationale. Christoph Bochdansky (né en 1960) s’inspire des arts plastiques et cherche toujours de nouvelles façons d’articuler le jeu entre l’homme et l’objet. Ses mises en scène originales des nouvelles de Rainer Maria Rilke Le Tueur de dragon et Frau Blahas Magd, en collaboration avec Rose Breuss (danse), témoignent de cette démarche.
Le Kabinett-Theater de Julia Reichert (née en 1950) et Christopher Widauer (né en 1961) produit des spectacles en collaboration avec des artistes et des compagnies venus d’autres arts du spectacle (opéra, théâtre d’acteurs, etc.).

S’organiser et promouvoir

Depuis les années quatre-vingt, de nombreuses associations nationales et régionales, comme le Club autrichien de la Marionnette, ont été créées. Elles offrent notamment des formations aux métiers des marionnettes.

L’Autriche ne possède pas de centre de formation universitaire consacrée aux arts de la marionnette, mais les programmes universitaires offrent une place toujours plus importante à la découverte et à l’enseignement de ces arts. Par ailleurs, l’association IMAGO, qui travaille depuis 2003, en coopération avec le Festival de Théâtre de Figures de Wels, à la promotion du théâtre de figures, vise à établir une formation initiale et continue aux arts de la marionnette basée sur la coopération internationale des enseignants, des artistes et des étudiants.

De nombreux festivals internationaux ont été créés à l’initiative d’artistes. Gustav Dubelowski-Gellhorn (1912-1991) (voir Pupilla), est à l’origine de la création en 1990 du Festival international de Théâtre de Figures de Wels. Karin Schäfer et son Figurentheater organisent le festival PannOpticum à Neusiedl am See. Airan Berg et Martina Winkel (Theater ohne Grenzen, Théâtre sans Frontières) ont lancé un festival international biennal de théâtre de marionnettes pour adultes, Die Macht des Staunens (La Force de l’Étonnement). Il faut aussi citer les festivals de Mistelbach, de Hohenems et de Klagenfurt.

(Voir aussi Théâtre de Marionnettes au château Esterháza, Karl Michael Joseph von Pauersbach, Oskar Kokoschka.)

Bibliographie

  • Feustel, Gottfried. Prinzessin und Spaßmacher. Eine Kulturgeschichte des
  • Puppentheaters der Welt [Princesse et bouffon. Une histoire culturelle du théâtre de marionnettes mondial]. Leipzig, 1990.
  • Grünewald, Dietrich. Vom Umgang mit Papiertheater [De l’usage du théâtre de papier]. Éd. Hannelore Prosche. Berlin: Volk und Wissen/CVK, 1993.
  • Hadamowsky, Franz. “Wien – Theatergeschichte. Von den Anfängen bis zum Ende des Ersten Weltkriegs” [Vienne – Histoire du théâtre. Des débuts à la fin de la Première Guerre mondiale]. Geschichte der Stadt Wien [Histoire de la ville de Vienne]. Éd. Felix Czeike. Wien, München: Youth and Culture, 1988.
  • Kindermann, Heinz. Theatergeschichte Europas. Das Theater der Antike und des Mittelalters. [Histoire du théâtre en Europe. Le théâtre de l’Antiquité et du Moyen-Âge]. Salzbourg, 1957.
  • Minuth, Johannes. Das Kaspertheater und seine Entwicklungsgeschichte [Le théâtre de Kasper et l’histoire de son évolution]. Francfort-sur-le-Main: Puppen und Masken, 1996.
  • Muhr, Adelbert. Praterbuch [Livre du Prater]. Vienne, 1947.
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  • Tanzer, Gerhard. Spectacle müssen seyn…Die Freizeit der Wiener im 18. Jahrhundert [Que les spectacles soient…Les loisirs des Viennois au xviiie siècle]. Coll. “Kulturstudien”. Vol. 21. Vienne, Cologne, Weimar: Boehlau, 1992.
  • Wegner, Manfred (éd.). Die Spiele der Puppe. Beiträge zur Kunst- und Sozialgeschichte des Figurentheaters im 19. und 20. Jahrhundert [Les jeux de la marionnette. Contributions à l’histoire artistique et sociale du théâtre de figures aux XIXe et XXe siècles]. Cologne: Prometh-Verlag, 1989.