Institution fondée en 1981 à Charleville-Mézières (Ardennes, France), à l’initiative de Jacques Félix. Le projet eut comme partenaires André Lebon, maire de la ville à l’époque, et l’ Union internationale de la marionnette (UNIMA), représentée par Henryk Jurkowski et par Margareta Niculescu, en qualité de membres fondateurs. Sergueï Obraztsov, président de l’UNIMA, et Jacques Félix, président de l’IIM, signèrent ainsi un protocole d’accord engageant l’UNIMA à apporter ses compétences en matière de formation professionnelle. Par ailleurs, la création de l’IIM répondait au vœu de nombreux marionnettistes itinérants de par le monde : pouvoir disposer d’un lieu fixe, actif en permanence. Le contexte national et international lui était favorable et les marionnettistes français représentés par le Centre national de la marionnette (CNM, aujourd’hui THEMAA), l’UNIMA-France et par l’association Marionnettes et Thérapie apportèrent également leur soutien.
L’Institut international de la marionnette (IIM) fonctionne sous le régime de la loi de 1901 et bénéficie de l’aide financière – essentielle pour son fonctionnement, ses projets et ses actions – du ministère de la Culture (DMDTS), de la région Champagne-Ardenne, du conseil général des Ardennes et de la ville de Charleville-Mézières.
Une des premières initiatives, prises sous la direction de François Larose, de 1981 à 1983, fut d’ouvrir un centre de documentation, à la suite de la donation d’un important fonds de livres par le marionnettiste Jean-Loup Temporal.
Nommée directrice de l’IIM en 1985, Margareta Niculescu, responsable depuis 1981 des stages internationaux de formation continue, donna à l’institution une orientation professionnelle, affirmant la vocation internationale de l’IIM et sa volonté de participer de manière dynamique et innovante au développement des arts de la marionnette. Seul établissement international au service d’un art et d’une profession en plein essor, regroupant dans un même lieu un ensemble d’activités, l’IIM se veut un lieu de rassemblement des arts de la marionnette sans distinction de genres, d’expressions, de techniques, cherchant à désenclaver l’art de la marionnette, à promouvoir le croisement avec les autres arts de la scène. Il se veut un lieu de rencontres, de réflexion et de recherche, afin d’accompagner la création contemporaine sur les voies du renouveau. Les deux piliers de ses activités à caractère pérenne sont la formation, à tous les niveaux, et la recherche scientifique, accompagnée de son corollaire, l’édition. Pour mener à bien les missions qu’il s’est données, l’IIM a créé d’autres structures ayant à leur charge un programme propre et des moyens spécifiques : l’École nationale supérieure des arts de la marionnette (ESNAM) ; une salle de spectacles; les éditions de l’IIM; la Villa d’Aubilly, résidence pour chercheurs et créateurs.
Enseignement et formation
L’École Nationale Supérieure des Arts de la Marionnette, unique école en France pour la formation professionnelle des jeunes marionnettistes français et étrangers, accueillit sa première promotion en 1987. Le souci de l’École est d’inscrire dans son programme pédagogique la pluridisciplinarité. Elle permet à l’élève d’acquérir les connaissances fondamentales du métier en leur associant les pratiques les plus expérimentales. La présence systématique d’ateliers de création, animés par des artistes reconnus pour leur travail novateur, ouvre un horizon inspirateur, provoque l’envie d’une recherche personnelle. Premier conseil de professeurs : Jean-Luc Félix, Claire Heggen, François Lazaro, Jean-Pierre Lescot, Margareta Niculescu, Alain Recoing. (Voir École nationale supérieure des arts de la marionnette.)
Des stages ouverts à des professionnels des arts de la scène ont lieu chaque année. On en compte deux ou trois par an, d’une durée de trois à quatre semaines. Ils sont thématiques et dirigés par des maîtres marionnettistes dont l’expérience est reconnue : Alvaro Apocalypse, Gavin Glover, Claire Heggen, Jean-Louis Heckel, François Lazaro, Henryk Jurkowski, Jan Dvorák, Albrecht Roser, Frank Soehnle, Fabrizio Montecchi, Ilka Schönbein …
Les ateliers de transmission, conçus comme de véritables rencontres, accueillent des artistes venus des arts de la scène, en général, désireux de vivre et de partager l’expérience créative des grands maîtres qui ont marqué l’évolution – une véritable révolution – des arts, disponibles et ouverts au « jeu » de la transmission tels que Tadeusz Kantor, Josef Svoboda, Peter Schumann, Jim Henson, Leszek Madzic, Philippe Genty, Henk Boerwinkel, Josef Krofta …Des maîtres orientaux tels que Nyoman Sumandhi, Asep Sunandar Sunarya, Yoshida Minotaro, Koriú Nishikawa, Yang Feng, ont transmis leurs traditions.
Recherche, édition et documentation
Une résidence, la Villa d’Aubilly, fut en 1996 mise à la disposition des chercheurs et des créateurs souhaitant avoir accès au centre de documentation et bénéficier d’un suivi scientifique. Des bourses sont accordées par l’IIM (aides à la consultation, au séjour, aux projets). La résidence propose des séminaires et des colloques sur des sujets ciblés. Dans le même esprit interdisciplinaire, l’IIM a lancé un Réseau international des sources de recherche.
Les éditions IIM furent créées pour combler les carences dans le domaine de la recherche scientifique appliquée à la marionnette. L’IIM a ainsi mis en œuvre depuis 1986 un programme éditorial et publie depuis 1988 la revue annuelle PUCK, la marionnette et les autres arts, dont la fondatrice est Margareta Niculescu et la rédactrice en chef Brunella Eruli.
Les principaux ouvrages sont : Théâtre d’ombre. Tradition et Modernité sous la direction de Stathis Damianakos, en co-édition avec L’Harmattan (1986) ; Écrivains et Marionnettes. Quatre siècles de littérature dramatique en Europe de Henryk Jurkowski ; L’Acteur en effigie de Didier Plassard en co-édition avec L’Âge d’homme (1992) ; Images de la marionnette dans la littérature d’Annie Gilles en co-édition avec les Presses universitaires de Nancy (1991) ; Opéra baroque et marionnette de Jean-Luc Impe (1993) ; Les Mains de lumière, anthologie de textes réunis et présentés par Didier Plassard (1996) ; Métamorphoses, la marionnette au xxe siècle de Henryk Jurkowski (2000). En outre, l’Institut a publié des catalogues d’exposition : Marionnettes en territoire africain d’Olenka Darkowska-Nidzgorski (1991) ; Marionnettes en territoire brésilien, ouvrage collectif, sous la direction de Bruno Mikol (1994) ; Marionnettes en territoire japonais de Michiko Ueno-Herr (1997).
En 2007, Lucile Bodson, directrice de l’IIM, reprend le programme éditorial en partenariat avec les Éditions l’Entretemps et confie la direction de la collection « La main qui parle » à Margareta Niculescu : Métamorphoses, deuxième édition, revue et augmentée, de Henryk Jurkowski (2008) ; Les oiseaux architectes-Le montreur d’Adzirie, de Roland Shön (2009); Passeurs et complices, de Lucile Bodson, Margareta Niculescu, Patrick Pezin (2009) ; Mémoires improvisés d’un montreur de marionnettes, d’Alain Recoing (2011) ; Le théâtre des fous, de E. G.Craig, édition bilingue français-anglais (2012).
L’IIM possède un patrimoine de marionnettes anciennes telles que des Wayang Golek et Wayang Kulit (voir Wayang), du théâtre Karagöz turc et des personnages du théâtre de marionnettes sur l’eau du Vietnam qui font l’objet d’expositions ponctuelles.
Le Centre de documentation sur les arts de la marionnette est ouvert pour tous les publics et se compose d’une bibliothèque (8 000 ouvrages aujourd’hui dont 130 ouvrages anciens publiés du XVIIe au XIXe siècle, une soixantaine de périodiques en provenance du monde entier), d’une vidéothèque (1 800 vidéos de spectacles) qui se compose de captations de spectacles, de travaux des élèves de l’ESNAM, d’ateliers formation. Le fonds documentaire du Centre est systématiquement enrichi par les activités de l’IIM, de l’école, du Festival mondial des théâtres de marionnettes et des compagnies françaises et étrangères ayant leur propre production documentaire. Le Centre met à jour des dossiers thématiques sur l’activité et les créations des compagnies de marionnettes, françaises et étrangères, une information indispensable pour les chercheurs, journalistes, créateurs et professionnels des arts de la scène.
Rencontres et échanges
L’IIM organise des événements qui permettent de nourrir une réflexion commune entre marionnettistes et personnalités du monde culturel, universitaires, critiques, enseignants, étudiants, théoriciens, historiens. Ainsi des Rencontres internationales des écoles de marionnettes, en 1990 et 1993, qui devinrent les Rencontres internationales des enseignements artistiques, en 1996 et en 1999 et des rencontres thématiques servant de passerelles entre la marionnette et les autres arts comme la Rencontre internationale des critiques de théâtre, en collaboration avec l’Association internationale des critiques de théâtre (1988) ; Musiques en mouvement, présidée par Georges Aperghis, rencontre entre le théâtre musical, des plasticiens et le théâtre de marionnettes (1992) ou encore la Rencontre sur l’enseignement de l’histoire et de la théorie au sein des écoles supérieures de marionnettes (1995), présidée par Robert Abirached.
En 1990, l’IIM proposa de créer une Convention internationale des écoles de marionnettes (CIEM) qui fut signée par dix-sept écoles. En 1992, la CIEM adhéra à la Ligue européenne des enseignements artistiques (ELIA) et des rencontres ont désormais lieu dans de nombreux pays dont la Pologne, la Russie, la Slovénie et la Finlande. Fidèle à son projet de construire des ponts en direction d’autres cultures, l’IIM a proposé, pendant les festivals de Charleville-Mézières, des événements complexes offrant un large aperçu de « la marionnette facteur de culture » sous le titre générique de Marionnettes en territoire (africain en 1991, brésilien en 1994 et japonais en 1997). L’événement se compose d’une exposition, de spectacles, de démonstrations de jeu et de techniques spécifiques. Les manifestations sont aussi l’occasion de découvrir les traditions parfois lointaines, et les chemins expressifs du théâtre d’aujourd’hui.
Les lieux
Trois bâtiments, proches les uns des autres, forment une sorte de campus, en triangle, au cœur de Charleville-Mézières. Outre le centre de documentation, les éditions de l’IIM et l’administration, le siège abrite une salle de spectacle : équipée de 80 places, elle accueille toutes les manifestations ponctuelles et propose un programme varié avec des compagnies françaises et étrangères invitées tout au long de l’année, ainsi que les travaux et créations des élèves. La Villa d’Aubilly offre, dans une belle bâtisse du XVIIIe siècle, une résidence pour chercheurs et créateurs. L’École nationale supérieure des arts de la marionnette, possède des ateliers, des salles de répétitions, un théâtre en plein air équipé de gradins qui permet de construire une relation active avec un large public.
La direction de l’IIM a été successivement assurée par Margareta Niculescu de 1985 à 1998, Roman Paska de 1999 à 2002, Lucile Bodson (2003-2014) et, depuis 2014, par Eloi Recoing. L’arrivée de Lucile Bodson apporte de nouvelles initiatives et enrichit la panoplie des activités de l’IIM en diversifiant ses publics. La création de spectacles et l’insertion professionnelle des jeunes diplômés, soutenues par la région Champagne-Ardenne, sont ses priorités. Des stages au sein de compagnies leur sont proposés. Par ailleurs, de jeunes artistes sont accueillis en résidence de création.
L’inscription de l’IIM dans le paysage culturel de la région s’est renforcée ces dernières années, notamment à travers des présentations d’élèves ou des expositions en tournée.
Depuis 2011, le Portail des Arts de la Marionnette (PAM), dédié à la valorisation des arts de la marionnette, tant dans leur dimension patrimoniale que par ses pratiques contemporaines, est administré et animé par l’Institut International de la Marionnette : on y trouve aujourd’hui plus de 30 000 documents. Sa vocation est de s’élargir à une dimension européenne.