Peintre et sculpteur suisse. La cinquantaine de marionnettes à gaine que le célèbre artiste créa entre 1916 et 1925 à Munich et à Weimar pour son fils Felix, dont une trentaine a été conservée, ne sont bien connues que depuis leur présentation permanente au Zentrum Paul Klee à Berne, ouvert en 2005 . Elles ont été montrées au public pour la première fois en 1979, dans le cadre d’une exposition consacrée à la place des marionnettes, des sculptures, des reliefs, des masques, et des objets de théâtre dans l’expression artistique de Klee au musée d’Art et d’histoire de Neuchâtel. Bien que marginale (au-delà des nombreuses critiques d’opéras et de spectacles, ainsi que de plusieurs réflexions ayant pour thème les marionnettes, les masques et la musique), on relève une certaine dimension théâtrale dans l’œuvre de Klee. Il voyait en effet la réalité théâtrale comme un monde d’apparences, de sons et d’images. Sur les quelque dix mille pièces que comporte son œuvre, il créa, seulement une soixantaine en trois dimensions, dont les marionnettes.

Klee s’intéressa aux volumes à partir de 1915, en privilégiant le plâtre pour ses créations. Les têtes des marionnettes furent aussi réalisées dans leur majorité en plâtre, mais il y incorpora toutes sortes d’objets courants, laissés souvent visibles. Les vêtements – sauf les premiers, cousus par Sasha von Sinner – furent créés par Klee avec les restes de tissus qu’il cousait grossièrement, sans ourlet ni finitions. Ses personnages bizarres témoignent du grand sens théâtral, de la parodie, de la satire et de l’humour de leur créateur. En 1916, Klee fabriqua également pour son fils un théâtre et des décors (malheureusement perdus) en collant des restes de tissus sur un grand cadre qu’il suspendit dans une embrasure de porte.

À l’époque du Bauhaus, ce cadre fut intégré en retrait dans un plus grand, de sorte que le castelet comportait deux plans de jeu. Un rideau de scène aurait utilisé des reproductions tirées de l’Almanach du Blaue Reiter. On connait par des photographies, plusieurs toiles de fond montant un paysage, un édifice ou une composition géométrique dans le style de Klee à cette époque. Les premières marionnettes, créées à Munich pour Felix, âgé de neuf ans, reprenaient les figures traditionnelles du théâtre de Kasperl ; les représentations, données par Paul Klee, étaient alors purement familiales. Par la suite, à Weimar (de 1920 à 1925), Klee inventa ses personnages, expérimenta librement formes et matières (plâtre, cartons, gaze, papier, bois, etc.) et céda à Felix la conduite des représentations ; celles-ci étaient publiques, payantes, souvent liées aux fêtes du Bauhaus. Parmi les trente marionnettes qui subsistent, sont particulièrement dignes d’attention : Monsieur la Mort (1916, plâtre) ; Le Poète couronné (1919, plâtre, métal, gaze, ruban) ; L’Autoportrait de Klee, aux immenses yeux bruns et bonnet de fourrure (1922 en plâtre et os de bœuf) ; Le Diable (1922, plâtre, gant et anneau métallique) ; Spectre électrique (1923, plâtre et prise de courant) ; Fantôme noir (1924, papier mâché) ; L’Esprit de la boite d’allumettes (1925, boîte d’allumettes, plume).

(Voir Suisse.)

Bibliographie

  • Comte, Philippe. Klee. Paris : Casterman, Nouvelles éditions françaises, 1991.
  • Dorst, Tankred. Auf kleiner Bühne. Versuche mit Marionetten. Munich, 1959.
  • Dorst, Tankred. Geheimnis der Marionette. Munich, 1957.
  • Geelhaar, Christian. Paul Klee et le Bauhaus. Neuchâtel: Idées et calendes, 1972.
  • Kotte, Andreas, Simone Gojan, Joël Aguet, and Pierre Lepori, eds. Theaterlexikon der Schweiz / Dictionnaire du théâtre en Suisse / Dizionario teatrale svizzero / Lexicon da teater svizzer. Berne: Chronos, 2005.
  • Paul Klee. Puppen, Plastiken, Reliefs, Masken, Theater. Neuchâtel: Éditions Galerie suisse de Paris, 1979. (Textes en allemand, anglais et français)